Qui a décrété que les femmes rondes ne pouvaient pas être sportives et rayonnantes de santé ? Certainement pas les « fit fat girls ». Ces influenceuses, modèles « plus size » et coachs en ligne, bousculent les clichés selon lesquels le surpoids serait systématiquement synonyme de sédentarité, de paresse ou de mauvaise hygiène de vie. À travers leurs publications, elles prouvent que l’on peut être grosse (au sens de l’IMC) tout en étant passionnée de sport et d’exercices physiques. Cet élan s’inscrit dans la mouvance du « body positivisme » et invite chacun·e à s’aimer, à se dépasser et à prendre soin de soi, quels que soient son tour de taille ou ses poignées d’amour.
Qu’est-ce qu’une Fit Fat Girl ?
Les « fit fat girls » (littéralement, « les filles grosses et sportives ») sont des femmes qui se définissent à la fois comme étant en surpoids ou obèses – au sens strict de l’Indice de Masse Corporelle (IMC) – et adeptes de pratiques sportives variées : yoga, fitness, danse, cardio, musculation, running… Contrairement à l’idée reçue selon laquelle toutes les personnes rondes seraient sédentaires, ces femmes brisent les stéréotypes en montrant que le poids sur la balance n’est pas l’unique indicateur de bonne santé.
Leur mission dépasse le cadre de la simple pratique sportive. Elles souhaitent redonner confiance à toutes celles (et ceux) qui n’osent pas s’inscrire en salle de sport, poster des photos d’elles en tenue moulante, ou même pratiquer le sport qui leur plaît en raison de jugements externes (ou internes). Les fit fat girls s’affichent fièrement sur les réseaux sociaux : en leggings de sport, sur un tapis de yoga, en plein entraînement de boxe ou de danse, tout en arborant un large sourire et un message d’acceptation de soi.
D’où vient ce mouvement et en quoi est-il lié au Body Positivisme ?
Le mouvement « body positive » est né d’une volonté de renverser les diktats de la minceur et de la perfection imposée par la mode, la publicité et une partie de l’industrie des médias. L’idée de base est simple : chaque corps mérite d’être aimé et valorisé, qu’il soit mince, musclé, rond, en situation de handicap ou porteur de cicatrices.
C’est dans ce contexte que les fit fat girls ont émergé sur Instagram, YouTube et d’autres plateformes : elles sont l’incarnation vivante de ce discours bienveillant, en allant au-delà de la simple publication de photos « body positive ». Elles montrent comment pratiquer un sport avec plaisir, dans le respect de son corps et sans se fixer l’objectif de fondre à tout prix.
La tendance du « body posi » a permis à de nombreuses femmes de lever le voile sur des complexes et des préjugés, souvent nourris depuis l’adolescence. Les fit fat girls poussent encore plus loin cette démarche en revendiquant que l’on peut être « gros » selon l’IMC et se sentir à l’aise dans un cours de fitness ou un entraînement intensif.
Peut-on être en surpoids et en bonne santé ?
L’IMC, un indicateur à nuancer
La médecine considère qu’une personne est en surpoids lorsque son IMC (Indice de Masse Corporelle) est supérieur à 25, et obèse lorsque ce même indice dépasse 30. Cependant, il est désormais reconnu que l’IMC a été initialement pensé comme un indicateur statistique pour mesurer l’état de santé de populations entières. Il ne prend pas en compte la répartition de la masse graisseuse, la masse musculaire, la densité osseuse ni la génétique de chaque individu.
Ainsi, des athlètes de haut niveau, comme certains rugbymen ou judokas, sont parfois classés en obésité sur la seule base de leur IMC, alors qu’ils sont en parfaite santé. Les fit fat girls contribuent à déconstruire ce phénomène de « pathologisation » systématique de l’obésité. Bien qu’il soit crucial de rester vigilant·e à son équilibre cardio-vasculaire, sa tension et son taux de cholestérol, avoir un poids élevé ne signifie pas toujours être malade ou à risque.
L’obésité métabolique saine : une réalité
Des études ont démontré l’existence d’une « obésité métabolique saine ». En d’autres termes, certaines personnes ayant un IMC élevé présentent néanmoins des paramètres de santé (tension artérielle, glycémie, bilan lipidique…) tout à fait normaux. Leur sécrétion d’insuline, leur endurance, leur capacité respiratoire et cardiovasculaire ne sont pas altérées.
Ces constats brouillent la frontière entre l’image purement esthétique du corps rond et la santé réelle de la personne. Les fit fat girls mettent en lumière ce fait : vous pouvez très bien aimer courir, pratiquer le yoga ou faire des squats régulièrement, même avec une silhouette ronde.
Les visages emblématiques des Fit Fat Girls
Ashley Graham, l’icône qui a ouvert la voie
Ashley Graham est souvent citée comme la muse des femmes « plus size ». Mannequin grande taille, elle a défilé pour de nombreuses marques et fait la couverture de magazines internationaux. Sans se revendiquer explicitement « fit fat girl », elle a toutefois mis en avant l’importance de l’activité physique pour entretenir sa forme et son bien-être. En postant sur les réseaux sociaux ses séances de sport, elle prouve qu’une taille 42 ou plus n’empêche pas de s’épanouir dans un training exigeant.
Jessamyn Stanley : la yogi qui défie la gravité
Avec son compte Instagram « My Name Is Jessamyn », cette Américaine en surpoids illustre à merveille l’idée qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un corps longiligne pour réaliser des postures de yoga renversantes. Elle se contorsionne, elle sourit, elle assume. Ses photos et vidéos sont un véritable vent de fraîcheur pour toutes celles qui pensaient ne pas être « faites » pour cette discipline.
Lisa Nasri (Happy.fit_) : la coach française qui casse les préjugés
En France, la coach sportive Lisa Nasri, alias « happy.fit_ » sur Instagram, fait beaucoup parler d’elle. Son concept ? Proposer des cours ludiques et accessibles à tous, dans la joie, la bonne humeur et surtout le respect du corps. Forte d’une expérience à l’étranger, elle souligne l’importance d’adapter chaque mouvement à son physique. Elle encourage aussi ses élèves – rondeurs incluses – à apprécier chaque progrès, indépendamment de la balance. Son mantra : « Pas de complexe, pas de pression. Du plaisir avant tout ! »
D’autres influenceuses sur les réseaux
- Whitney Way Thore : célèbre pour son émission de télé-réalité « My Big Fat Fabulous Life », elle prouve que l’on peut danser, sourire et vivre pleinement avec des rondeurs généreuses.
- Beauteronde (@beauteronde) : Beauteronde est une femme passionnée de body positivisme qui partage son univers sur Instagram. Sur son compte @beauteronde, elle propose des conseils mode, des astuces pour bouger et des témoignages inspirants, toujours dans la bienveillance et l’acceptation de soi.
- Valérie Sagun (BigGalYoga) : adepte du yoga, elle partage son quotidien sur les réseaux, tout en véhiculant des messages de body positivity.
- Stéphanie Zwicky : blogueuse « plus size » francophone pionnière, elle a intégré progressivement le sport à son quotidien et en parle librement à sa communauté.
- Lalaa Misaki : gourou de la mode grande taille en France, adepte de la danse et de la boxe, elle prouve qu’il n’y a pas de « barrière de poids » pour se mettre en mouvement et transpirer.
Toutes ces femmes incarnent parfaitement l’idée que l’on peut rester ronde tout en entretenant une excellente condition physique et une vitalité contagieuse.
Les préjugés auxquels font face les Fit Fat Girls
Malgré l’essor du « body posi », les fit fat girls se heurtent encore à de nombreuses réactions négatives. Parmi les critiques les plus fréquentes, on retrouve :
- « Faire l’apologie de l’obésité » : certains estiment que montrer des corps « hors norme » en train de s’amuser en salle de sport ou en leggings serait un encouragement à « rester obèse ». En réalité, ces influenceuses ne font qu’inviter au bien-être et à l’acceptation de soi, sans nier l’importance d’une bonne hygiène de vie.
- « Être en danger de mort » : pour une partie du corps médical et d’une opinion publique peu informée, l’obésité est automatiquement liée à des risques de maladies cardiovasculaires, de diabète et de complications multiples. Les fit fat girls, tout en restant conscientes de leur santé, rappellent que faire du sport régulièrement est un atout majeur pour prévenir les risques, même avec un IMC élevé.
- « Être feignante » : l’un des pires stéréotypes reste l’association entre rondeur et paresse. En affichant leurs entraînements et leurs progrès, ces femmes brisent cette idée reçue en montrant qu’elles ne manquent ni d’énergie, ni de volonté.
- « Ne pas avoir le corps d’une coach » : c’est le cas de Lisa Nasri qui souligne régulièrement la différence de traitement entre la France et l’étranger. Le métier de coach sportive y est encore trop souvent associé à un stéréotype de minceur. Elle, au contraire, prouve qu’elle peut motiver les autres et transmettre ses connaissances, quelle que soit sa taille de pantalon.
Conseils pratiques pour s’accepter et se mettre au sport quand on est ronde
1. S’observer sans jugement
Comme le conseille Lisa, se mettre nu·e devant le miroir peut être un excellent point de départ. Cela permet d’observer son corps tel qu’il est, de prendre conscience de ses formes, de ses rondeurs, de ses éventuelles transformations (grossesse, changement de rythme de vie, etc.). Ce premier pas est souvent difficile psychologiquement, mais il est libérateur : on reconnaît enfin son corps et on s’autorise à l’aimer.
2. Définir ses objectifs en toute honnêteté
Faire du sport pour perdre du poids n’est pas une fatalité ; l’objectif peut être différent : gagner en souplesse, améliorer son cardio, réduire le stress, booster son énergie, etc. Les fit fat girls encouragent chacun·e à se fixer des buts réalistes et personnalisés, sans se laisser enfermer par la pression sociale du chiffre sur la balance.
3. Choisir une activité qui fait plaisir
Courir sur un tapis de course peut vite devenir ennuyeux si on n’aime pas ça. Heureusement, la palette des activités physiques est vaste : danse, natation, boxe, yoga, Pilates, aquagym, vélo… Pour beaucoup, la clé de la régularité réside dans le plaisir que l’on éprouve pendant l’effort. En s’amusant, on oublie la notion d’effort au sens contraint, et on se concentre sur les sensations positives.
4. Adapter l’entraînement à son corps
Il n’existe pas de règle universelle. Ce qui convient à l’une ne conviendra pas nécessairement à l’autre. Un corps rond n’a pas la même morphologie qu’un corps fin ou musculaire. Il est donc primordial d’adapter les exercices, l’intensité, la fréquence et la durée de l’activité. Travailler avec un coach formé à la diversité corporelle peut être un excellent moyen d’adopter les bons réflexes.
5. S’équiper correctement
Se sentir à l’aise dans sa tenue de sport est essentiel. Opter pour des vêtements adaptés à sa morphologie (leggings, brassières renforcées pour la poitrine, baskets avec un bon maintien, etc.) permet de bouger librement et de prendre plaisir à l’entraînement. Aujourd’hui, de plus en plus de marques proposent des gammes « plus size » performantes et stylées.
6. Ne pas négliger le mental
Le sport, ce n’est pas seulement du physique, c’est aussi beaucoup de mental. Il s’agit de développer la persévérance, l’estime de soi, la confiance. Les fit fat girls insistent sur la nécessité d’adopter un discours intérieur positif : se féliciter pour chaque progrès, chaque séance réalisée, plutôt que de se flageller si les résultats esthétiques ne sont pas immédiats.
7. Accepter de se tromper et progresser à son rythme
Chaque parcours est unique. Il est normal de tâtonner, d’essayer plusieurs sports, d’avoir des périodes de baisse de motivation ou des moments où le corps ne peut pas répondre à 100 %. L’important est de ne pas abandonner au premier obstacle et de se rappeler pourquoi on a commencé.
Les bénéfices du sport pour les femmes rondes
Au-delà de la dimension purement physique (perte de poids éventuelle, meilleure endurance, etc.), pratiquer une activité sportive régulière contribue à :
- Réduire le stress et l’anxiété : la production d’endorphines pendant l’effort procure une sensation de bien-être et de relaxation.
- Renforcer la confiance en soi : en sortant de sa zone de confort, on prend conscience de ses capacités et on apprend à aimer son corps pour ce qu’il peut accomplir.
- Favoriser une meilleure santé globale : même sans perte de poids significative, le sport améliore la circulation sanguine, la capacité respiratoire et la force musculaire.
- Créer un sentiment d’appartenance : s’inscrire à des cours collectifs ou rejoindre des communautés en ligne permet de rencontrer d’autres personnes partageant des objectifs similaires et de se sentir moins seule face au jugement.
Le message essentiel : le sport n’est pas l’ennemi des rondeurs
Les fit fat girls nous rappellent que le sport peut être une célébration du corps, plutôt qu’un chemin de croix vers la minceur à tout prix. L’idée n’est pas de nier les risques potentiels que peuvent engendrer l’obésité ou le surpoids, mais plutôt de souligner que chaque individu doit être considéré dans sa globalité : métabolisme, antécédents familiaux, environnement, bien-être mental…
S’affranchir de la tyrannie du « summer body » ou des injonctions incessantes à maigrir permet à beaucoup de femmes rondes de renouer avec la joie de bouger, de danser, de courir ou de pratiquer tout autre exercice. Le secret n’est pas de rentrer dans un certain type de corps, mais de trouver ce qui fait du bien, en harmonie avec sa morphologie et ses aspirations.
Source de l'image de couverture : IA CANVA