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Le mouvement body positive est souvent associé aux réseaux sociaux, aux mannequins grandes tailles ou aux militantes féministes. Mais une autre scène artistique s’engage puissamment pour cette cause : celle des drag queens. En France, plusieurs artistes drag portent fièrement un message d’acceptation des corps, en dehors des standards imposés par la mode et les médias. Elles sont grandes, rondes, minces, musclées, non-binaires ou queer. Et toutes participent, à leur façon, à libérer les regards et les esprits.

Qui sont les figures engagées du drag français ?

La scène drag française regorge de talents qui mêlent art, activisme et fierté corporelle. Parmi les plus connues, La Big Bertha est un exemple emblématique. Artiste de cabaret, vue dans la version française de Drag Race, elle revendique haut et fort la visibilité des corps hors normes. Sur scène, elle joue avec les stéréotypes, s’en amuse, les renverse. Elle montre que la graisse peut être glamour, politique, sensuelle. Sa présence imposante devient un outil de rébellion contre les canons restrictifs.

Mais Bertha n’est pas la seule. Patachtouille, artiste non binaire et burlesque, s’inscrit aussi dans une volonté d’inclusion. Leur drag brouille les genres, les formes et les rôles traditionnels. Ils utilisent leur corps comme un outil artistique et militant, refusant les normes genrées et corporelles. Par le maquillage, les performances et les discours, ils ouvrent la voie à une féminité et une beauté queer, sans barrière.

Comment les drag queens déconstruisent-elles les normes ?

Le drag français ne se limite pas au divertissement. C’est une réflexion sur les apparences. Les queens militantes utilisent leur image pour renverser les attentes : pourquoi un corps gras serait-il moins esthétique ? Pourquoi un menton prononcé, une pilosité, des vergetures devraient-ils être cachés ? Par l’excès, la démesure, l’autodérision et la mise en scène, ces artistes invitent à réfléchir.

Elles se mettent en lumière, non pas pour être admirées, mais pour être vues telles qu’elles sont. Le drag permet d’exagérer des traits souvent moqués dans la vie réelle : double menton, ventre rebondi, rides profondes. Sur scène, ces mêmes « défauts » deviennent de puissants outils d’expression. C’est un acte de défiance contre la grossophobie et le capacitisme qui traversent notre société.

Quelles queens françaises incarnent la pluralité des corps ?

Outre La Big Bertha, plusieurs autres queens françaises militent à leur manière pour plus d’inclusivité. La Kahena, drag queen d’origine maghrébine, revendique une beauté arabe et opulente. Ses shows intègrent des références culturelles multiples, et montrent que le drag peut aussi être un espace de réconciliation identitaire.

Jerrie Blossom, queen afro-descendante, mêle engagement féministe et déconstruction raciale. Elle n’hésite pas à aborder des sujets tabous comme la sexualité des corps gros et racisés. Son esthétique puissante, riche en couleurs, met en valeur des silhouettes trop souvent écartées des podiums et écrans. Elle fait de son corps un manifeste.

Le drag français est-il à la hauteur de ses cousines américaines ?

Si les États-Unis ont longtemps dominé la scène drag, grâce à des émissions comme RuPaul’s Drag Race, la France a développé un style bien à elle. Plus cabaret, plus engagé, plus politique parfois. Les queens françaises ne disposent pas toujours des mêmes budgets ou de la même exposition, mais leur message n’en est pas moins puissant.

Certaines collaborent avec des collectifs féministes, queer ou anti-validistes. Elles interviennent dans des ateliers scolaires, des tables rondes, ou des actions de sensibilisation. Leur militantisme ne s’arrête pas à la scène. Il s’ancre dans le quotidien, dans la rue, dans les associations. Leur objectif : désamorcer les hontes, réparer les regards, ouvrir des possibles.

Quel rôle joue le drag dans les luttes anti-grossophobie ?

Le corps gros est encore perçu comme un corps à corriger. Dans les médias, les séries, les campagnes de pub, il reste marginalisé, caricaturé ou invisibilisé. Le drag vient détourner ces logiques. Une queen ronde ne cherche pas à se faire oublier. Elle prend la scène, le cadre, la parole. Elle magnifie ce que la société voudrait voir diminuer.

En mettant en scène leurs rondeurs, en jouant avec les codes de la beauté classique, les queens offrent une alternative au récit dominant. Elles prouvent que le sexy, le glamour, le spectaculaire ne sont pas réservés aux tailles 36. Elles ouvrent une nouvelle manière de penser la présence scénique, mais aussi la visibilité sociale des corps gros.

Comment ces artistes influencent-elles les plus jeunes ?

Les jeunes drag queens ou artistes en devenir trouvent dans ces figures des modèles puissants. Il n’est plus nécessaire de se transformer pour être aimé.e, mais d’oser être soi. Leurs discours, souvent diffusés sur Instagram, TikTok ou dans des performances en live, résonnent avec une jeunesse en quête de représentation.

Certaines organisent même des ateliers de drag pour ados, où il ne s’agit pas seulement de maquillage, mais de confiance en soi. Ces espaces permettent de découvrir que l’art peut être un refuge, un exutoire, une affirmation. Et que les corps divers sont l’avenir d’un drag plus riche, plus juste, plus émancipateur.

Pourquoi ces queens méritent-elles plus de visibilité ?

Parce qu’elles défient les normes avec talent, courage et humour. Parce qu’elles nous rappellent que l’acceptation de soi passe par la représentation. Et parce qu’elles prouvent, soir après soir, que la beauté est plurielle. Leur engagement pour les corps divers ne se limite pas à un slogan. Il s’incarne, se vit, s’invente chaque jour dans leurs spectacles, leurs prises de parole, leurs choix artistiques.

Ces drag queens françaises ne se contentent pas d’imiter des standards. Elles les explosent. Et dans les éclats de leurs performances, c’est un miroir nouveau qu’elles tendent à toutes celles et ceux qui se sentent trop gros, trop minces, trop queer, trop bruyants, trop différents. Ce miroir dit une chose essentielle : votre corps a sa place. Sur scène, et dans la vie.

Source de l'image de couverture : <a href="https://www.freepik.com/free-photo/lifestyle-drag-queen_31982175.htm">Image by freepik</a>

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