Il est souvent difficile de maintenir une perte de poids durable après un régime. Ce phénomène, connu sous le nom d’effet yo-yo, a longtemps été perçu comme un échec personnel. Mais une étude récente publiée dans Nature dévoile une nouvelle cause : les cellules adipeuses, responsables du stockage des graisses, conserveraient une mémoire moléculaire de l’obésité. Cette découverte remet en question les idées reçues sur la perte de poids.
Le corps, un allié… mais aussi un obstacle
Lors d’une perte de poids, le corps lutte activement pour préserver ses réserves d’énergie. Cette réponse biologique est une stratégie évolutive, développée pour survivre en cas de famine. Mais elle complique la tâche pour ceux qui souhaitent mincir.
Les chercheurs ont observé des changements au niveau de l’ADN des cellules adipeuses. Ces modifications, appelées changements épigénétiques, activent certains gènes tout en en inhibant d’autres. Elles perturbent la façon dont les graisses sont stockées ou brûlées. Même après un régime, ces altérations persistent, augmentant les risques de reprendre les kilos perdus.
Fait marquant : à alimentation équivalente, une personne ayant souffert d’obésité prendra du poids plus rapidement qu’une personne n’ayant jamais été obèse. Cette prédisposition biologique explique en partie pourquoi 85 % des individus reprennent leurs kilos dans l’année suivant un régime.
Une mémoire obésogène gravée dans les tissus
Pour comprendre ce phénomène, les chercheurs ont analysé des tissus adipeux humains avant et après une chirurgie bariatrique. Ils ont constaté des modifications dans l’expression des gènes, liées au métabolisme, à l’inflammation et à la signalisation cellulaire. Ces changements rendent les cellules adipeuses hyper-réactives à une alimentation riche en graisses.
Chez les souris, l’expérience a révélé une mémoire épigénétique encore plus marquée. Lorsqu’elles retrouvent une alimentation calorique, ces souris reprennent du poids plus rapidement que celles n’ayant jamais été obèses.
Une lueur d’espoir : peut-on effacer cette mémoire ?
Tout n’est pas perdu pour autant. Selon Laura Hinte, chercheuse à l’origine de l’étude, maintenir un poids stable sur une longue période pourrait suffire à effacer cette mémoire moléculaire. Cette hypothèse reste toutefois à confirmer.
Cette découverte ouvre aussi la voie à des traitements futurs. Mais leur développement prendra du temps. Pour l’instant, l’accent est mis sur l’importance de déstigmatiser les échecs liés aux régimes. Comme l’explique le professeur Benoit Arsenault, ces échecs ne sont pas une question de volonté individuelle, mais bien de biologie.
Une nouvelle approche pour mieux vivre avec son corps
L’effet yo-yo ne se limite pas à des conséquences physiques. Les tentatives répétées de perte de poids peuvent avoir un impact psychologique négatif, notamment sur l’estime de soi. Ces nouvelles connaissances pourraient offrir une paix d’esprit aux personnes concernées, en les aidant à développer une relation plus saine avec leur corps.
De plus, l’étude rappelle que l’activité physique est bénéfique, même sans perte de poids significative. Les bienfaits sur la santé cardiovasculaire et mentale sont nombreux et permettent d’améliorer le bien-être global.
Repenser les objectifs : des petits changements pour de grands bénéfices
L’étude souligne un point essentiel : perdre 5 à 1O % de son poids corporel initial suffit à obtenir des effets spectaculaires sur la santé. Inutile de viser des pertes de poids drastiques. Cette approche réaliste peut aider à recadrer les attentes et à privilégier des changements progressifs, mais durables.
Vers une meilleure compréhension de l’obésité
Cette découverte marque une avancée majeure dans la compréhension de l’obésité. En reconnaissant les mécanismes complexes qui l’entourent, elle incite à repenser les stratégies pour accompagner les personnes dans leur parcours. Plus qu’une simple question de régime, c’est une réflexion globale sur la santé physique et mentale qui s’impose.
Cet article met en lumière une vérité fondamentale : il est temps d’arrêter de blâmer les individus pour ce qui relève de processus biologiques complexes. Au lieu de cela, célébrons les petites victoires et adoptons une vision bienveillante envers nos corps.
Source photo de couverture : IA d'Adobe Firefly