Les réseaux sociaux ont un impact indéniable sur notre perception des normes sociales, en particulier en ce qui concerne le poids et l’apparence physique. Une étude récente menée par les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et l’Université de Genève met en lumière une réalité préoccupante : la stigmatisation des gros et les discours négatifs sur l’obésité sur les réseaux sociaux.
Une analyse alarmante des discours en ligne
Entre avril 2O19 et décembre 2O22, plus de 53 OOO tweets en anglais ont été analysés dans le cadre de cette recherche. L’objectif ? Comprendre comment l’obésité est perçue par le grand public, les personnalités politiques, les célébrités et les organisations influentes. Les résultats sont sans appel : près de 7O % des tweets étudiés véhiculent des sentiments négatifs. Les messages neutres représentent environ 21 %, tandis que seulement 9 % sont positifs.
Cette tendance à la critique ne cesse d’augmenter. Les chercheurs ont également relevé des associations fréquentes entre l’obésité et des problématiques sociales telles que le racisme, les choix de vie perçus comme déviants, et des comportements jugés irresponsables, comme la consommation d’alcool ou de substances illicites.
Le rôle des influenceurs et des personnalités publiques
Les figures publiques, qu’elles soient politiques ou issues du monde du divertissement, jouent un rôle crucial dans la propagation de ces discours négatifs. L’étude a révélé que les pics de commentaires critiques coïncident souvent avec des déclarations ou des événements impliquant des personnalités connues. Par exemple, les hospitalisations de célébrités en surpoids pour des complications liées au Covid-19, les annonces sur la perte de poids de leaders politiques ou encore les campagnes anti-obésité du gouvernement britannique ont généré une vague de tweets stigmatisants.
Lorsque ces figures influentes expriment des opinions négatives, leurs abonnés tendent à reproduire ces discours, amplifiant ainsi la stigmatisation. Les chercheurs insistent sur la responsabilité des personnalités publiques dans leurs prises de parole, notamment en matière de santé publique.
Des répercussions sur la santé mentale et physique
La stigmatisation de l’obésité sur les réseaux sociaux a des conséquences profondes. En plus de renforcer des préjugés déjà ancrés, elle contribue à des problèmes de santé mentale pour les personnes concernées, notamment l’anxiété, la dépression et une estime de soi réduite. Ces effets psychologiques peuvent également compliquer la prise en charge médicale et la prévention, car les individus stigmatisés hésitent parfois à consulter par peur du jugement.
Par ailleurs, cette négativité nuit à l’efficacité des politiques de santé publique. Les campagnes visant à encourager des habitudes de vie plus saines risquent d’être perçues comme culpabilisantes, rendant leur impact limité.
Les réseaux sociaux : un outil à double tranchant
Si les plateformes numériques peuvent alimenter la stigmatisation, elles offrent également une opportunité unique de promouvoir des discours positifs et inclusifs. Les chercheurs ont souligné la nécessité de comprendre les dynamiques des réseaux sociaux pour mieux élaborer des stratégies de santé publique adaptées.
L’analyse combinée de données par intelligence artificielle et intervention humaine utilisée dans cette étude représente un outil précieux pour cerner les attitudes et comportements liés à des sujets de santé complexes. Cette méthode pourrait être déployée pour contrer la désinformation et encourager des conversations constructives.
Vers une responsabilité collective
Lutter contre les préjugés liés à l’obésité exige une prise de conscience collective. Les personnalités publiques et les influenceurs doivent mesurer l’impact de leurs propos sur leurs abonnés et sur la société dans son ensemble. De leur côté, les plateformes sociales pourraient renforcer leurs politiques de modération pour limiter la diffusion de messages haineux.
Enfin, les utilisateurs eux-mêmes ont un rôle à jouer. Chacun peut contribuer à des échanges respectueux et éviter de relayer des contenus stigmatisants.
Une maladie au-delà des apparences
L’obésité est une maladie chronique, souvent liée à des facteurs génétiques, environnementaux et psychologiques. Elle ne se résume pas à une question de choix de vie ou de volonté personnelle. Avec une prévalence mondiale ayant quadruplé depuis 198O, il est essentiel de repenser notre manière d’aborder ce problème.
Les chercheurs rappellent que comprendre les perceptions et attitudes du public est crucial pour élaborer des politiques et des approches thérapeutiques adaptées. En intégrant les défis spécifiques posés par les réseaux sociaux, il est possible de construire des stratégies de prévention plus efficaces et plus inclusives.
Les réseaux sociaux, bien qu’ils soient une plateforme d’expression et de partage, peuvent également devenir un terrain fertile pour la stigmatisation. Cette étude révèle à quel point les discours négatifs sur l’obésité sont omniprésents et en augmentation. Cependant, en prenant conscience de ce phénomène et en agissant à différents niveaux, il est possible de transformer ces outils en vecteurs de soutien et d’éducation. La lutte contre la stigmatisation de l’obésité est l’affaire de tous, des célébrités aux citoyens anonymes. Ensemble, nous pouvons faire évoluer les mentalités et bâtir une société plus inclusive.
Source image de couverture : IA Adobe Firefly